Appel fondateur de l'OST

31 octobre 2023

Lors du lancement de l’OST à Tours, notre raison première d’être a été le support aux personnes trans, afin de combler un vide. C’est la base des premières associations trans : aider à la transition, lutter contre la transphobie, apporter des espaces de sociabilité. Nous avons ainsi organisé permanences, formations, moments communautaires.
Mais nous ne nous sommes pas arrêtés là : l’OST est devenue une organisation à part entière du milieu militant tourangeau, participant aux luttes féministes, sociales, syndicales. En effet, nous avons rapidement observé que se limiter à quelques permanences d’aide ne suffisait pas. Nous devions prendre en compte la transphobie comme un phénomène systémique, au service d’un système qui nous exploite : le capitalisme. La lutte, nous la pensons comme de l’autosupport à long terme. Si sans autosupport, une organisation trans de lutte n’a pas de sens, sans lutte, une organisation d’autosupport seul ne pourra jamais achever son travail.
C’est avec cette même idée qu’il a été nécessaire pour l’OST de sortir de l’échelle locale. De participer à un mouvement trans national, que ce soit la construction d’un tissu de pôles d’aide locaux que le développement de mobilisations. Aujourd’hui, nous franchissons une nouvelle étape de notre construction : l’OST s’est structurée en une organisation nationale, sous la forme de sections.

Le début de l’année 2023 a été secoué par un mouvement social de grande ampleur, contre une énième casse sociale du gouvernement bourgeois. La participation de l’OST y était une évidence. Nous avons dès le 9 janvier appelé les trans à combattre la réforme des retraites. De Tours à Nîmes, en passant par l’Île-de-France, nos camarades étaient investi-es dans leurs luttes locales. Une mobilisation qui résonnait encore plus pour nous, les trans, population précarisée. Si des initiatives LGBTI ont été remarquées, nous n’avons pu qu’observer avec regret que la participation des collectifs trans était très faible.
Il est pourtant plus qu’urgent de se servir du tremplin des mouvements LGBTI pour intensifier la participation à toutes les luttes sociales, à l’instar de la réforme des retraites ou de la loi Darmanin, car celles-ci doivent faire partie intégrante de notre agenda. Parce que nous, les trans, nous sommes des travailleurs-ses, sinon des personnes qui sommes exclu-es du travail, ces luttes permettent tout autant que les mobilisations trans-centrées d’améliorer nos conditions immédiates. Ces luttes sont aussi des luttes trans. Et nous ne devons pas seulement inciter les trans à les rejoindre et à s’organiser collectivement en tant que prolétaires, mais aussi lancer ces luttes et les faire rejoindre celles spécifiquement trans. C’est par ce moyen que nous parviendrons à faire rentrer l’agenda trans dans celui de toutes les luttes sociales.

Depuis vingt ans, les associations trans locales se multiplient et forment un maillage important. Ce mouvement souffre, cependant, d’une absence totale d’échanges comme de pratiques et de vision politique à long terme. Si un espace de coordination est à construire, nous arrivons à un point où même cela n’est plus assez.
À l'heure actuelle, nous sommes forcé-es d’observer que nos droits continuent d’être menacés, voire de reculer de par le monde. Nous ne sommes plus seulement considéré-es comme des dangers ou des malades par une société qui nous psychiatrise, nous exclut, nous tue : le combat contre nos vies est devenu un acte central de la propagande des réactionnaires. Nous ne pouvons pas non plus faire confiance aux politiques pseudo-progressistes qui ont démontré leur indifférence lorsqu’ils sont au pouvoir. Alors, pour faire face à une nouvelle étape du militantisme antitrans, nous devons ouvrir une nouvelle étape du mouvement trans. Comme l’appelait l’ExisTransInter cette année, « il est l’heure d’organiser un grand front pour nos droits au sein de l’ensemble des mouvements antiraciste, anti-patriarcat et anticapitaliste. » Cette union des forces sociales pour nos droits, c’est un travail de longue haleine qui attend tout le mouvement trans. Un travail qui doit être mené en vue de l’amélioration concrète des conditions des personnes trans à toutes les échelles et qui a des conséquences jusque dans l’autosupport même, car nous nous devons d’être un relais et un point d'appui de ces organisations.
Il nous paraît alors qu’une nouvelle étape est à franchir dans la construction de l’OST, afin de pouvoir répondre à ce travail : celle d’être une organisation nationale. Contactés par des camarades de différents coins de la France, nous avons décidé d’unir nos forces et ensemble de développer nos pratiques d’autosupport et militantes.

Après presque un an de travail, l’OST est prête à fonctionner nationalement. Nos cadres démocratiques sont développés, notre fonctionnement devenu routinier et quatre premières sections prêtes à être mises en branle. Nous maintenons à côté le contact avec plusieurs camarades d’autres villes afin de poursuivre notre construction.
Nos sections locales sont notre pierre angulaire. C'est là que l’OST est active en premier lieu, que nous maintenons du lien avec la masse des personnes trans, que nous tentons de répondre à ses besoins, que nous posons la première pierre auprès des autres collectifs. L'OST est aussi un outil pour le développement de structures dans des villes où celles-ci sont inexistantes.
Notre organisation nationale est la raison d’être de ces sections. Sans coordination, sans union des forces, sans outil pour se former, pour s’organiser dans les luttes, sans outil pour développer le contact avec les autres organisations, notre travail à l’échelle locale perd son sens et se fait sans vision sur le long terme.
Ces six derniers mois ont d’ailleurs vu l’OST développer ses liens avec les autres organisations du mouvement social comme jamais auparavant. Après les Rencontres politiques trans en 2022, un investissement conséquent dans l’ExisTransInter, nous avons participé à la Coordination féministe, au Cadre unitaire national du 8 mars, aux marches des Fiertés à travers la France, développé nos liens avec des associations féministes, des partis révolutionnaires et des syndicats, dont certains nous ont même accueilli ce printemps à leurs rencontres nationales.

L’Organisation de Solidarité Trans se développe de jour en jour. Cette rentrée, nous fêtons nos deux ans d’existence, mais surtout la création d’une organisation nationale et de quatre premières sections. Après Tours, à Nîmes et à Lille, nos membres sont formés et ont débuté une activité de terrain. À Troyes, nous avons la fierté d’avoir fusionné avec Transinter Association.
Pour une réelle amélioration de nos conditions et de nos parcours de transition, pour lutter contre les réactionnaires qui veulent nous voir disparaître, il est devenu une nécessité pour nous, personnes trans, de nous organiser. À l’OST, nous proposons de ne pas réduire notre activité à un seul auto-support ou à une échelle locale, mais bien à se regrouper et à perpétuer ensemble nos pratiques et notre militantisme. À tous les trans de France : organisons-nous, rejoignons l’OST !